Nous travaillons à la fabrication des films, nous sommes techniciens du cinéma. Nous venons d’apprendre que la SRF (Société des réalisateurs de films) a déposé le 14 mars 2014 une requête devant le Conseil d’État demandant l’annulation de l’extension de la convention collective du cinéma.
Cette démarche nous inquiète et nous attriste, il est incompréhensible que des réalisateurs puissent penser que nos salaires sont la cause de leurs problèmes, nos droits une entrave à leur créativité.
Aujourd’hui nous avons enfin une convention collective, fruit d’une très longue négociation, qui garantit à chacun un traitement équitable. Et c’est précisément cette protection qui, selon le conseil d’administration de la SRF, serait tellement intolérable qu’il faudrait y mettre fin sans attendre.
Des réalisateurs s’opposant à leur équipe ? Cette déchirure est non seulement douloureuse, mais totalement absurde. Cette division ne peut rien produire de positif, elle va susciter la méfiance et la peur réciproque. Elle est symptomatique d’une période de crise, où l’explication des problèmes se résume à la recherche d’un bouc émissaire. Ce bouc émissaire s’appelle aujourd’hui convention collective du cinéma.
Nous savons que parmi ces réalisateurs, beaucoup rencontrent de grandes difficultés à faire leurs films et sans doute connaissent-ils bien les « réalités économiques » du secteur, mais leur position montre à quel point ils connaissent mal ceux avec qui ils travaillent : leurs propres difficultés économiques, leurs conditions de vie et leur investissement dans leur travail.
En l’absence de réglementation, notre situation à tous, techniciens et réalisateurs s’est gravement détériorée depuis une vingtaine d’années et grâce à cette convention collective nous avons l’opportunité de lutter ensemble pour obtenir des réformes du financement du cinéma.
Des signes encourageants sont déjà apparus, puisque d’autres réalisateurs, également membres de la SRF, se sont désolidarisés du recours en annulation auprès du Conseil d’État.
Nous tenons à saluer leur initiative et à soutenir leur texte intitulé « Fausse route ».
Nous reprenons à notre compte la conclusion de ce texte : « C’est tous unis que nous devrions nous battre pour que tous les films, sans exception, soient correctement exposés et financés. C’est dans “l’esprit de mai” que la SRF s’est créée en 1968. Un esprit de liberté, de lutte, de solidarité et d’ouverture. Où, dans le cinéma comme dans le reste du monde, chacun à sa place participe d’une même conquête, pour plus de justice et plus de liberté dans le travail comme dans la vie. Où les droits des créateurs ne sont pas opposables au droit du travail. C’est à cette tradition là que nous restons fidèles.
Mesdames et Messieurs du conseil d’administration de la SRF, vous faites fausse route. »
Le débat autour de la convention collective de la production cinématographique a été très vif tout au long de l’année 2013. Alors qu’elle a désormais force de loi, depuis la signature des décrets d’extension par le gouvernement, on pouvait espérer un apaisement des tensions et des divisions qui ont déchiré ceux qui étaient unis par l’amour du cinéma. Une convention collective n’est pas figée, chaque année les partenaires sociaux peuvent la remanier, l’améliorer, l’adapter. Vouloir la supprimer est un acte grave. C’est cette voie qu’a choisi le Conseil d’administration de la SRF. Les techniciens du cinéma se sont très peu exprimés. Cette pétition, initiée par quelques uns d’entre eux, veut faire entendre leur voix. Elle sera remise au Conseil d’administration de la SRF.
Vendredi 18 avril 2014
La SRF réagit à la pétition (Voir la réponse de la SRF))
Mercredi 23 avril 2014
La totalité des associations professionnelles, représentantes incontestables de ceux qui font le cinéma français soutiennent officiellement cette pétition : AAPCA, ACFDA, ADC, ADIT, ADP, ADPP, AFAP, AFAR, AFC, AFCCA, AFCF, AFCS, AFR, AFSI, AOA, ARC, ARDA, LMA, LSA, MAD, PFA et TIPPI (voir détail des associations).